Sans doute il est une justice universelle émanée de la raison seule ; mais cette justice pour être admise entre nous doit être réciproque. À considérer humainement les choses, faute de sanctions naturelles les lois de la justice sont vaines parmi les hommes ; elles ne font que le bien du méchant et le mal du juste, quand celui-ci les observe avec tout le monde sans que personne les observe avec lui. Il faut donc des conventions et des lois pour unir les droits aux devoirs et ramener la justice à son objet.
Citations Jean-Jacques Rousseau - page 11
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Ne m'a-t-il pas donné la conscience pour aimer le bien, la raison pour le connaître, la liberté pour le choisir ? Si je fais le mal, je n'ai point d'excuse ; je le fais parce que je le veux : lui demander de changer ma volonté, c'est lui demander ce qu'il me demande ; c'est vouloir qu'il fasse mon œuvre et que j'en recueille le salaire ; n'être pas content de mon état, c'est ne vouloir plus être homme, c'est vouloir autre chose que ce qui est, c'est vouloir le désordre et le mal.
Comme le premier pas vers le bien est de ne point faire de mal, le premier pas vers le bonheur est de ne point faire souffrir.
J'ai examiné d'assez près la police des grandes maisons, et j'ai vu clairement qu'il est impossible à un maître qui a vingt domestiques de venir jamais à bout de savoir s'il y a parmi eux un honnête homme, et de ne pas prendre pour tel le plus fripon de tous. Cela seul me dégoûterait d'être au nombre des riches. Un des plus doux plaisirs de la vie, le plaisir de la confiance et de l'estime, est perdu pour ces malheureux. Ils achètent bien cher tout leur or.
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Les hommes ne sont point faits pour être entassés en fourmilières, mais épars sur la terre qu'ils doivent cultiver. Plus ils se rassemblent, plus ils se corrompent. Les infirmités du corps, ainsi que les vices de l'âme, sont l'infaillible effet de ce concours trop nombreux. L'homme est de tous les animaux celui qui peut le moins vivre en troupeaux. Des hommes entassés comme des moutons périraient tous en très peu de temps. L'haleine de l'homme est mortelle à ses semblables : cela n'est pas moins vrai au propre qu'au figuré. Les villes sont le gouffre de l'espèce humaine.
Il n'y a point d'assujettissement si parfait que celui qui garde l'apparence de la liberté ; on captive ainsi la volonté même.
Ces tournures d'esprit qui rapportent toujours tout à notre intérêt matériel, qui font chercher partout du profit ou des remèdes, et qui feraient regarder avec indifférence toute la nature si l'on se portait toujours bien, n'ont jamais été les miennes.
Celle qui la première introduit le vice dans une âme bien née, étouffe la voix de la conscience par la clameur publique, et réprime l'audace de bien faire par la crainte du blâme. [...] Vous braveriez plutôt cent périls qu'une raillerie, et l'on ne vit jamais tant de timidité jointe à une âme aussi intrépide.
C'est en vain qu'on cherche au loin le bonheur quand on oublie de le cultiver soi-même
Gardons-nous d'annoncer la vérité à ceux qui ne sont pas en état de l'entendre, car c'est y vouloir substituer l'erreur.
[...] juge si j'ai raison d'appeler cette foule un désert, et de m'effrayer d'une solitude où je ne trouve qu'une vaine apparence de sentiments et de vérité, qui change à chaque instant et se détruit elle-même, où je n'aperçois que larves et fantômes qui frappent l'œil un moment et disparaissent aussitôt qu'on les veut saisir. Jusques ici j'ai vu beaucoup de masques, quand verrai-je des visages d'hommes ?
Tout homme veut être heureux ; mais pour parvenir à l'être, il faudrait commencer par savoir ce que c'est que le bonheur.
Sitôt qu'ils [les enfants] peuvent considérer les gens qui les environnent comme des instruments qu'il dépend d'eux de faire agir, ils s'en servent pour suivre leur penchant et suppléer à leur propre faiblesse. Voilà comment ils deviennent incommodes, tyrans, impérieux, méchants, indomptables ; progrès qui ne vient pas d'un esprit naturel de domination, mais qui le leur donne ; car il ne faut pas une longue expérience pour sentir combien il est agréable d'agir par les mains d'autrui, et de n'avoir besoin que de remuer la langue pour faire mouvoir l'univers.
Qu'une fille manque de raison, d'expérience pour juger de la sagesse et des mœurs, un bon père y doit suppléer sans doute ; son droit, son devoir même est de dire : Ma fille, c'est un honnête homme, ou, c'est un fripon ; c'est un homme de sens, ou, c'est un fou. Voilà les convenances dont il doit connaître ; le jugement de toutes les autres appartient à la fille.