La folie a sa propre logique et le vrai fou se sait sain d'esprit : c'est ce qui fait sa force. Il a un avantage énorme sur les autres, pour qui l'équilibre mental est avant tout une affaire de consensus.
Le monde romanesque n'est que la correction de ce monde-ci, suivant le désir profond de l'homme. Car il s'agit bien du même monde. La souffrance est la même, le mensonge et l'amour. Les héros ont notre langage, nos faiblesses, nos forces. Leur univers n'est ni plus beau ni plus édifiant que le nôtre. Mais eux, du moins, courent jusqu'au bout de leur destin et il n'est même jamais de si bouleversants héros que ceux qui vont jusqu'à l'extrémité de leur passion.
On entend aujourd'hui de nouveau l'éloge du " sérieux ", " ce sérieux qu'exigent les sujets et actions de haute importance ". Ce genre de gravité exprime clairement combien vieilles et graves sont devenues la folie et l'obsession. Car il n'y a rien de plus sérieux que le fou quand il en vient au point essentiel de sa folie ; devant l'objet de son zèle, il n'entend plus raillerie.