L'homme naturellement ambitieux et orgueilleux ne trouve jamais en lui-même pourquoi un autre lui doit commander, jusqu'à ce que son besoin propre le lui fasse sentir.
Le philosophe cherche la vérité et l'artiste, la beauté. Plus ambitieux, le moraliste, artiste et philosophe tout ensemble, cherche, comme une femme, le bonheur.
Les lignes qui précèdent montrent bien le monde incertain dans lequel doivent vivre les économistes autant que les responsables politiques : l'état actuel des connaissances macroéconomiques offrent certes beaucoup d'explication, mais il laisse aussi sans réponse de nombreuses questions. Pour les économistes, le défi consiste à trouver les réponses à ces questions et à étendre le champ des connaissances. Pour les responsables politiques, le défit est d'utiliser au mieux l'état actuel des connaissances pour améliorer les résultats économiques. Relever ces deux défis est certes ambitieux, mais pas impossible.
La superstition a la même racine que l'obéissance. L'esprit énervé qui se retranche le jugement personnel est promptement envahi par les croyances folles. Privé du discernement, il tombe dans le rêve, et sa débilité acquise le replonge parmi des imaginations d'enfant.
Un vrai peintre regarde avec plaisir un bras bien attaché et des muscles vigoureux, quand même ils seraient employés à assommer un homme. Un vrai romancier jouit par contemplation de la grandeur d'un sentiment nuisible - ou du mécanisme ordonné d'un caractère pernicieux.
J'aime mieux en rase campagne rencontrer un mouton qu'un lion; mais derrière une grille, j'aime mieux voir un lion qu'un mouton. L'art est justement cette sorte de grille; en ôtant la terreur, il conserve l'intérêt. Désormais, sans souffrance et sans danger, nous pouvons contempler les superbes passions, les déchirements, les luttes gigantesques, tout le tumulte et l'effort de la nature humaine, soulevée hors d'elle-même par des combats sans pitié et des désirs sans frein.
Voyez le travail machinal et monstrueux des candidats qui aspirent aux grandes écoles, puis, au sortir de ces mêmes écoles, la fatigue profonde, l'allanguissement, la flânerie au café ou à domicile, l'inertie bureaucratique ou provinciale. Comparez l'élève de l'École polytechnique, cloué quatorze heures par jour devant des formules, et l'ingénieur qui va bâiller, sa femme au bras, pour voir si ses cailloux sont bien cassés. Avec cet encombrement des carrières et cette réglementation des étapes, nous parvenons d'abord à essouffler nos chevaux de course, ensuite à les changer en bidets de fiacre.