L'expérience, donc, était un truc qui vous permettait, la conscience tranquille, de ne pas bouger le petit doigt. L'expérience était une valeur surestimée.
Se reconnaître comme une simple médiation, savoir que nous n'avons pas plus de réalité ni de destin propres qu'une vague sur la mer, c'est n'accorder à notre moi que l'identité d'une tenace apparence : c'est en être délivré.
Le caractère originairement expressif de tout le monde humain nous fait spontanément reconnaître le plus minime détail comme un signe, tout signe comme une déclaration d'intention, et cette intention comme révélatrice du choix originaire qu'a fait une personne de son attitude par rapport aux autres et au monde.
Parce que la vie est comme une énergie, un flux, ou un rayonnement, on sent d'autant plus ce qu'on en a reçu qu'on se sent le communiquer davantage. Aussi ne peut-on qu'éprouver toute impossibilité de s'exprimer ou de se communiquer comme une solitude, et la solitude comme une assignation à vivre avec la mort.
Au plus intérieur, au plus secret de nous-mêmes, l'avenir est un vide que nous nous efforçons en vain de remplir à chaque instant. Car vivre c'est attendre.